Rosa Diego Creixenti et Manon Pujol, lauréates du prix L’Oréal-UNESCO
Rosa Diego Creixenti, post-doctorante passionnée par l’ingénierie moléculaire, et Manon Pujol, post-doctorante qui dédie ses recherches au recyclage du polystyrène, font parties des 34 lauréates Jeunes Talents du prix l’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science 2025.
Issues de toutes les régions de France métropolitaine et d'outre-mer et travaillant dans des disciplines variées, 34 jeunes scientifiques sont récompensées lors de la 19ème édition du Prix Jeux Talents France 2025 L’Oréal-UNESCO. Pour les Femmes et la Science. Parmi elles, deux bordelaises, Rosa Diego Ceriwenti, post-doctorante au Centre de Recherche Paul Pascal1 , et Manon Pujol, post-doctorante au Laboratoire de Chimie des Polymères Organiques2 , ont été sélectionnées parmi près de 700 candidates.
Rosa Diego Creixenti
Rosa Diego Creixenti, chimiste de formation, est une chercheuse post-doctorante passionnée par l'ingénierie moléculaire. Ses travaux au Centre de Recherche Paul Pascal visent à créer des matériaux magnétiques fonctionnels aux propriétés inédites, essentiels pour les futures technologies. Rosa est également engagée dans la promotion de la science auprès des jeunes filles, en organisant des journées de sensibilisation. Son parcours, de l'Espagne à la Suède, puis en France, témoigne de son ouverture au travail multidisciplinaire et de sa volonté de briser les stéréotypes, convaincue que la diversité est une richesse pour la recherche.
Quels sont les enjeux de vos recherches et leurs applications ?
À long terme, je veux devenir une experte en magnétisme moléculaire, notamment dans l'étude des systèmes magnétiques dits « frustrés », où les boussoles internes des matériaux ne s'alignent pas parfaitement. Mon projet vise l'ingénierie moléculaire de ces réseaux pour faire progresser la science et créer de nouveaux matériaux fonctionnels. Ces matériaux aux propriétés uniques pourraient développer des dispositifs de stockage de données plus rapides et efficaces, et jouer un rôle clé dans l'émergence des technologies quantiques, qui exploitent les principes de la mécanique quantique, en stabilisant des états exotiques de la matière, des phases aux propriétés inhabituelles.
Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?
J'ai toujours eu une passion pour les sciences, même si mon choix de carrière n'a pas été évident. Mes bons résultats en chimie au lycée m'ont orientée vers cette voie. Ma vocation scientifique s'est confirmée lors de mon projet de fin d'études à l'Ångström Laboratory en Suède. J'y ai découvert l'importance du travail multidisciplinaire, en collaborant avec divers scientifiques, une expérience qui a profondément marqué mon parcours.
Dans votre parcours, avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?
L'une des difficultés a été parfois de ne pas être écoutée, ou de voir mes collègues masculins recevoir davantage de crédit. J'ai appris à affirmer ma voix, à faire reconnaître mes compétences et à rendre visible mon travail. Cette expérience m'a renforcée et m'a permis de gagner en confiance en tant que scientifique. J'assume désormais la responsabilité d'inspirer la génération suivante, en mettant en avant des exemples concrets et en montrant aux jeunes filles qu'elles ont pleinement leur place parmi les scientifiques.
Manon Pujol
Manon Pujol, post-doctorante à l'Université de Bordeaux, dédie ses recherches au recyclage du polystyrène, via un processus innovant qui utilise des enzymes pour transformer le plastique en molécules à haute valeur ajoutée utilisables par l’industrie pharmaceutique ou cosmétique. Son parcours, marqué par une passion précoce pour la chimie, l'a menée à explorer des voies alternatives pour un développement durable. Manon perçoit également son autisme comme une force unique au service de la recherche scientifique et souhaite inspirer d'autres jeunes femmes à embrasser les carrières scientifiques.
Quels sont les enjeux de vos recherches et leurs applications ?
Les plastiques sont indispensables, mais leur recyclage reste un défi énergivore. Mes recherches visent à surcycler le polystyrène, un plastique courant, en utilisant des enzymes, des catalyseurs biologiques. L'enjeu est de démontrer l'efficacité de cette méthode pour transformer le polystyrène en petites molécules oxydées à « haute valeur ajoutée ». Celles-ci sont très utiles pour les industries chimique, pharmaceutique et cosmétique. À terme, ce procédé pourrait être étendu à d'autres plastiques, offrant une alternative durable. On parle alors de surcyclage et non plus de recyclage.
Pourquoi avez-vous choisi une carrière scientifique ?
Je n'ai pas vraiment 'choisi' la science, cela s'est imposé comme une évidence. Les sciences ont toujours été ma matière préférée à l'école. La chimie, en particulier, m'a passionnée car je la perçois comme la base de tout ce qui nous entoure, le monde étant composé d'atomes. J'aime l'aspect exploratoire de la recherche : inventer des expériences, les mettre en place et découvrir des résultats. L'idée de contribuer à un futur meilleur en trouvant des solutions durables pour recycler les plastiques est également une motivation majeure.
Dans votre parcours, avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?
Dans mon parcours universitaire, je n'ai pas rencontré de difficultés particulières en tant que femme, la chimie étant relativement paritaire. Cependant, aujourd'hui, concilier ma carrière avec ma vie personnelle représente un défi, surtout dans un domaine aussi compétitif. Être une femme scientifique est une fierté et un engagement. Mon autisme, allié à ma condition de femme, m'a conféré une grande résilience et persévérance. Je considère cette différence comme une force et une richesse pour la science, et j'espère ainsi contribuer à un environnement où chacun peut s'épanouir.