Bourse "ERC Starting Grant" : 3 lauréats bordelais

Le Conseil européen de la recherche (ERC) vient d'annoncer les lauréats des bourses « Starting » qui financent de manière importante les projets de jeunes chercheurs et chercheuses. Le CNRS est l’institution hôte pour 15 bourses.

En 2022, le Conseil européen de la recherche (ERC) a sélectionné 408 scientifiques en Europe qui ont obtenu une bourse « Starting », pour un montant total de 636 millions d'euros tirés du programme cadre Horizon Europe. Le Conseil avait reçu 2 932 candidatures, soit un taux de succès de 13,9 %.

Ce financement entend soutenir des projets de recherche exploratoire sur une durée maximale de 5 ans et avec un budget de 1.5 million d'euros. Il s’adresse à des scientifiques ayant obtenu leur doctorat il y a 2 à 7 ans. Les bourses « Starting » sont le premier type de financement européen accessible aux jeunes chercheurs et chercheuses, avant les bourses « Consolidator » (jusqu’à 2 millions d’euros et 7 à 12 ans après le doctorat) et « Advanced » (jusqu’à 2,5 millions d’euros, pour les chercheurs confirmés).

Cette année, 39 % des bourses ont été accordées à des chercheuses. L’ensemble des lauréats sont issus de 26 pays de l’Union Européenne et associés, notamment l'Allemagne (81 projets), le Royaume-Uni (70), les Pays-Bas (40) et la France (39).

Cette année, la France affiche un taux de succès à cet appel de 9,5 % pour un taux succès moyen de 9,9 %. En 2021, le pays atteignait son meilleur score avec un taux de succès de 15,2 %. Le CNRS quant à lui affirme sa force en termes de capacité de réponse aux candidatures ERC avec un taux de succès de 15,6 %.

Mariya Gabriel, commissaire européenne à l’innovation, la recherche, la culture, l’éducation et la jeunesse se réjouie de « permettre aux jeunes chercheurs de suivre leur curiosité » et remarque que les nouveaux lauréats ERC « apportent une remarquable richesse d'idées scientifiques » qui permettra « d'approfondir nos connaissances » et alors que certains ont déjà des applications pratiques en vue. 

Retrouvez la liste des 15 lauréats Starting hébergés par le CNRS sur cnrs.fr

 

FOCUS SUR LE TERRITOIRE AQUITAIN DU CNRS

© Alix Grinsell

Samuel Beaulieu, lauréat CNRS de la délégation Aquitaine

Centre Lasers Intenses et Applications (CELIA - CNRS/CEA/université de Bordeaux)

Titre du projet : UTOPIQ - Ultrafast topological engineering of quantum materials

L’organisation des électrons aux seins de la matière joue un rôle fondamental dans l’émergence de leurs propriétés macroscopiques. Dans certains types de matériaux dits « quantiques », les effets étranges de la physique quantique jouent un rôle prédominant dans l’apparition de comportements exotiques de la matière tels que la supraconductivité, par exemple. Parmi la grande famille des matériaux quantiques, les matériaux topologiques, tirent leurs propriétés étonnantes d’une géométrie particulière des électrons au sein de la matière.

Malgré le fait que ces matériaux ont des propriétés très intéressantes pour plusieurs applications, comme par exemple l’informatique quantique, contrôler et sonder la topologie des électrons au sein de la matière restent des défis majeurs de la physique contemporaine.

Le projet UTOPIQ vise donc à s’attaquer à ces deux défis fondamentaux. Tout d’abord, des nouvelles techniques permettant la mesure de la topologie des électrons dans les matériaux quantiques seront développées. Ces nouvelles méthodes seront structurées autour de l’étude approfondie de l’effet photoélectrique, expliqué par Einstein il y a plus d’un siècle, qui consiste à arracher des électrons à la matière avec de lumière. En plus de mesurer l’énergie et l’angle d’éjection des électrons, grandeurs typiquement mesurées lors d’expériences de photoémission, nous étudierons l’effet de la rotation de la polarisation de la lumière lors de l’effet photoélectrique. Ces mesures promettent de révéler des informations inédites sur la topologie des électrons au sein des solides.

Par la suite, de nouveaux mécanismes permettant de contrôler la topologie des électrons au sein de la matière, à l’aide d’impulsions lumineuses ultra-brèves, seront développés et étudiés en détails. Alors que la topologie est typiquement contrôlée via des méthodes dites « à l’équilibre », telles que l’application de contraintes mécaniques ou la modification de la composition chimique des matériaux, l’approche du projet sera radicalement différente, en exploitant les états hors-équilibres induites par la photoexcitation de la matière. L’utilisation d’impulsions laser ultrarapides permettra donc d’étudier et de contrôler la topologie des électrons dans les matériaux quantiques sur des échelles de temps femtosecondes (10-15s).

© Amaury Badon

Chloé Grazon, lauréate CNRS de la délégation Aquitaine

Institut des sciences moléculaires (ISM - CNRS/université de Bordeaux/Bordeaux INP)

Titre du projet : COMET – On-demand COMmunication between fluorescent organic nanoparticles through Energy Transfer

Chloé Grazon, chargée de recherche à l’Institut des sciences moléculaires (ISM, CNRS/Université de Bordeaux/Institut polytechnique de Bordeaux), synthétise des biosenseurs à partir de nanoparticules organiques fluorescentes et étudie leurs propriétés photophysiques. De telles sondes servent par exemple à détecter, dans l’organisme ou dans des échantillons biologiques, des hormones, des métabolites, des médicaments et toutes sortes de petites molécules organiques dont la présence modifie la lumière émise par les nanoparticules. Ce signal lumineux est détectable par des spectrophotomètres de laboratoire, mais Chloé Grazon cherche également à rendre cette méthode compatible avec du matériel moins onéreux, qui serait par exemple disponible dans un cabinet médical.

Ses travaux ont reçu le soutien d’une bourse ERC Starting Grant dans le cadre du projet COMET. Il s’agira de synthétiser des nanoparticules non seulement plus compactes et plus brillantes, mais surtout capables de communiquer entre elles. « L’idée est que cette communication se fasse sous la forme d’un transfert d’énergie entre plusieurs nanoparticules, explique Chloé Grazon. Au lieu d’avoir juste des particules qui s’allument toutes de la même manière pour nous signaler de la présence de leur cible, un assemblage de différentes nanoparticules va nous donner des signaux beaucoup plus riches et complexes, et ainsi permettre d’améliorer la limite de détection des biosenseurs fluorescents existants à l’heure actuelle. »

Dans COMET, Chloé Grazon se concentrera sur l’optimisation de la chimie des nanoparticules par autoassemblage pour obtenir les propriétés optiques désirées. Dans un premier temps, elle désire mesurer la concentration en opiacés, mais ses travaux pourraient s’ouvrir à une gamme de cibles bien plus large. Ces biosenseurs devront également être réutilisables et rester purement organiques, pour des questions de développement durable et de biocompatibilité.

 « C’est très excitant de recevoir des moyens supplémentaires pour mener ses travaux, réagit Chloé Grazon à l’annonce de l’obtention de son ERC. J’encourage d’ailleurs les femmes à surmonter leur syndrome de l’imposteur et à postuler à de telles bourses. »

En savoir plus

Pour en savoir plus sur :

Retrouvez les BDs et vidéos de certains des projets scientifiques labellisé par l’Europe sur https://www.aquitaine.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/le-cnrs-aquitaine-et-le-joli-mois-de-leurope